
Claude VILARS CONFÉRENCIER -EXPERT EN ARTS
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Martincamp :
L’histoire d’un village potier au cœur de la Normandie

Bienvenue dans l’univers captivant de Martincamp, un hameau niché en bordure de la boutonnière du Pays de Bray, dans le nord de la Seine-Maritime.
Ce lieu, riche en histoire et en traditions artisanales, a été le témoin d’une activité potière florissante pendant des siècles. À travers cet article, je vous invite à explorer les secrets de ce village, ses artisans talentueux et leur héritage culturel.
En tant qu’expert en art français et professeur passionné, je vous propose de découvrir comment Martincamp a marqué l’histoire de la céramique normande, qui fait l’objet d’une conférence dans le cadre de mes initiations au patrimoine du XIIe au XXe siècle .
Martincamp, un hameau au cœur de la poterie normande

Un village, deux communautés artisanales
Martincamp, bien que modeste en apparence, a joué un rôle central dans l’économie rurale de la région.
Divisé en deux parties distinctes, le Fond de Bully et Martincamp, ce hameau a abrité deux communautés d’artisans prospères : les tuiliers et les potiers.
Les tuiliers exploitaient les gisements d’argile du Gault dans la dépression de la boutonnière, tandis que les potiers de Martincamp, installés sur le plateau, utilisaient le bois de la forêt d’Eawy pour cuire leurs créations en grès. Ces deux activités complémentaires ont contribué à la richesse et à l’essor démographique de la paroisse.
Une production artisanale d’envergure
Les potiers de Martincamp ont produit des millions de pots et de plats en trois siècles, dépassant largement les besoins du marché local. Leur succès s’explique par leur proximité avec le carrefour des Hayons, un point stratégique où se croisent les routes reliant Dieppe, Rouen, Paris et la Picardie. Cette position géographique leur a permis d’exporter leurs créations vers des destinations lointaines, comme l’Angleterre et l’Amérique du Nord.

Les débuts de la poterie à Martincamp
Des origines modestes à une activité florissante
Martincamp a su se distinguer en développant une production rurale de grès, une céramique durable et résistante. Les premiers potiers de Martincamp, comme Simon Leguest et Michel Goubert, sont mentionnés dès 1550 dans des actes notariés. Leur activité s’est intensifiée grâce à la gestion rigoureuse des forêts domaniales, qui fournissaient le bois nécessaire à la cuisson des poteries.
Une communauté soudée et protégée
Les potiers de Martincamp ont bénéficié de la protection de puissants seigneurs locaux, qui voyaient dans leur activité un moyen d’exploiter efficacement les ressources forestières.
En 1623, un acte du tabellionnage de Saint-Saëns mentionne déjà une quinzaine d’ateliers de potiers à Martincamp, preuve de l’importance de cette activité dès le début du XVIIe siècle.
Des artisans au cœur de la vie locale
Des artisans au cœur de la vie locale : les familles de potiers de Martincamp
Les potiers de Martincamp n’étaient pas seulement des artisans : ils étaient également des agriculteurs, des herbagers et des membres actifs de la communauté.
Leurs ateliers, souvent familiaux, se transmettaient de génération en génération, renforçant ainsi les liens sociaux et économiques du hameau.
Parmi les familles les plus emblématiques, on retrouve les Sauteur, les Milet et les Laurent, qui ont marqué l’histoire de la poterie à Martincamp.

Les Sauteur : une dynastie controversée
La famille Sauteur est l’une des plus célèbres de Martincamp, mais aussi l’une des plus tumultueuses. Les archives regorgent de récits de conflits et de procès impliquant ses membres. Par exemple, en 1736, Pierre Sauteur dit Duhoux, laboureur, est accusé par Marie Coeurederoy, veuve de Jean Caillé, d’avoir coupé des arbres lui appartenant. Les témoignages de l’époque, comme ceux de Nicolas Petit et Jean Dubois, tous deux potiers, montrent à quel point les relations entre les familles pouvaient être tendues.
Les Milet : une ascension modeste
Contrairement aux Sauteur, la famille Milet est issue d’un milieu plus humble.
Jean Nicolas Marc Milet, par exemple, n’était pas riche, mais il a su se faire une place dans le monde de la poterie. Sa fille, Marie-Jeanne Milet, épouse un potier et contribue à perpétuer la tradition familiale.
Leur histoire montre que, malgré des débuts modestes, il était possible de réussir dans ce métier grâce à la persévérance et au savoir-faire.

Jean Laurent : le dernier maître potier
Jean Laurent, originaire de Rennes, a marqué la fin de l’âge d’or de la poterie à Martincamp.
Formé à Forges-les-Eaux, il s’installe en 1855 dans l’atelier laissé par la famille Milet. Avec son associé Théophile Hodeng et sa femme Julienne Thiessé, il modernise la production en introduisant des techniques de moulage et en diversifiant les créations.
Ses poteries, bien que différentes des productions traditionnelles, portent son empreinte unique, avec des cachets à son nom et des décors innovants.
Jean Laurent était également un homme engagé dans la vie locale. Conseiller municipal de Bully, il a contribué à la vie communautaire jusqu’à sa mort en 1910, marquant la fin de l’activité potière à Martincamp.
Le déclin et l’héritage de la poterie à Martincamp
Les défis du XIXe siècle
Au XIXe siècle, la poterie de Martincamp a commencé à décliner, face à la concurrence de la faïence et des matériaux modernes, comme le métal et le verre. Cependant, des potiers comme Jean Laurent ont su innover en introduisant des techniques de moulage et en diversifiant leur production. Leur héritage perdure encore aujourd’hui dans les collections de céramiques normandes.
Un patrimoine à redécouvrir

Martincamp reste un témoignage précieux de l’histoire artisanale normande. Ses poteries, aujourd’hui exposées dans des musées et des collections privées, continuent de fasciner les amateurs d’art et d’histoire. En tant qu’expert en art français, je vous invite à découvrir cette richesse culturelle à travers mes cours d’initiation au patrimoine du XIIe au XXe siècle .