Claude VILARS CONFÉRENCIER -EXPERT EN ARTS
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Porcelaines de : VALOGNES - CAEN - ISIGNY
MANUFACTURE DE PORCELAINE DE VALOGNES
Les dirigeants et son évolution
En 1792, un groupe de riches habitants de Valognes avait créé une fabrique de faïence pour tenter de concurrencer les importations de faïences fines anglaises. Elle était dirigée par Le Tellier de la Bertinière. Comme plus tard pour la fabrique de Daigremont à Caen, et pour les mêmes raisons, les résultats financiers furent décevants. Il fut donc décidé d'abandonner la faïence et de se lancer dans la fabrication de porcelaine.
La direction de cette nouvelle manufacture fut confiée à Jean Thomas Michel Le Masson, il s'occupa de lui trouver des locaux et acheta personnellement ceux de l'ancien couvent des Cordeliers.
La production était presque exclusivement composée de pièces en porcelaine blanche de ménage, les pièces décorées étant rares. Les affaires étaient florissantes et le kaolin local suscitait la convoitise. Mais Le Masson mourut en 1797, lourde perte pour la manufacture.
Les actionnaires firent alors appel à Edme Louis Pelouze, très bon technicien et chimiste parisien, qui poursuivit le même type de fabrication. Malgré l'ouverture d'un magasin de vente à Caen, l'écoulement restait très local et trop limité. Après 5 ans Pelouze quitta la manufacture.
C'est alors que Joachim Langlois, qui avait reçu quelques actions en remboursement d'une créance, visita la fabrique. D'un caractère entreprenant, il proposa aux actionnaires d'en prendre la direction et de la relancer, bien qu'il n'ait aucune connaissance technique.
Après un stage à Sèvres, Joachim Langlois devint le nouveau directeur en 1802. Il embaucha de nombreux employés et décida de compléter la vaisselle utilitaire par des pièces de luxe destinées aux châteaux et à l'exportation. Il fit appel à des décorateurs talentueux, sa famille et lui-même participant à la décoration.
Il améliorait constamment sa production et participa aux Expositions nationales pour la faire connaître, obtenant des récompenses. Cependant les ventes restaient irrégulières, entraînant des problèmes financiers.
En 1812, faute d'accord pour prolonger l'activité, la société fut dissoute après 10 ans. Mais Joachim Langlois allait reprendre ses fabrications à Bayeux grâce à l'expérience acquise.
La production
La production se caractérise par des formes et décors de l'époque. On y trouve une influence de #Sèvres, beaucoup de #dorures et de #scènesbucoliques. Avant 1802, il s'agissait surtout d'objets blancs utilitaires puis après, de #piècesdeluxe comme #vases, #têtesàtête, #statues... Le #décor "au barbeau" était très utilisé pour les #servicestable et #café.
MANUFACTURE DE CAEN (1797-1814) De la faïence à la porcelaine
La faïence :
En 1797, un groupe de notables de Caen a créé une manufacture de faïence, la direction a été confiée à François Nicolas Daigremont, assisté techniquement par Aubry de la Noe. L'atelier a été installé dans l'ancien couvent des Capucins, rue Caponière, et s'est spécialisé dans une faïence fine de style anglais. Mais ces produits souffraient de la concurrence des faïences anglaises importées, et la manufacture a rencontré de nombreuses difficultés. Après deux ans et devant cet insuccès, il a été décidé d'abandonner la faïence pour se consacrer à la porcelaine dure.
La porcelaine : Les dirigeants et son évolution
En 1799, la fabrique a été transférée dans des bâtiments entre l'église de Vaucelles et le moulin de Montegu. Un magasin de vente a également été ouvert place Royale à Caen.
Pour renforcer l'équipe existante, on fit venir de plusieurs manufactures parisiennes des tourneurs, des mouleurs et surtout des décorateurs. La fabrication de porcelaine de luxe dans l'esprit de Sèvres connut d'abord un certain succès. Mais limitée à une clientèle locale, la demande s'épuisa rapidement.
D'autre part, les coûts élevés, notamment celui du kaolin, ainsi que certaines opérations financières hasardeuses du directeur entraînèrent de graves difficultés pour la société.
En 1802, Daigremont quitta la direction, remplacé par Thierry, chimiste actionnaire, qui s'adjoignit l'excellent décorateur Mallet. Leur passage à la tête de la manufacture ne dura que quelques mois. La direction fut alors confiée à Ducheval qui, en bon gestionnaire, essaya de rétablir la situation. Il abandonna d'abord le kaolin de Saint-Yrieix pour celui de Beaufray puis des Pieux. Grâce à ce dernier, il ajouta à la fabrication de luxe, celle de porcelaine à feu et de vaisselle blanche moins onéreuse pour toucher une clientèle plus large. Enfin, il ouvrit une boutique mieux située en centre-ville. Parallèlement, de la porcelaine de luxe non décorée était fournie à des décorateurs parisiens comme Dastin et Halley.
En 1805 elle fut reprise par une nouvelle société sous la direction de Fontaine, avec une gestion plus rigoureuse et davantage axée sur la vaisselle courante. Mais les problèmes financiers resurgirent, précipités par l'ouverture en 1812 de la manufacture de Bayeux. Celle de Caen dut fermer définitivement en 1814.
Les décors :
Les fonds sont le plus souvent blancs, mais on trouve aussi des fonds #violacés, #jaunes, #roses ou #marbrésbruns. Certaines #tasses sont entièrement #dorées intérieurement.
Les #décors, exécutés sur #émail, sont soit #dorés (filets, #rinceaux, guirlandes, palmettes), soit #polychromes avec des guirlandes et #bouquetsdefleurs ou feuillages reliés par des nœuds, des #paniersfleuris, des médaillons inspirés de #Sèvres, des #frisesflorales, des semis de fleurs et feuilles.
On trouve aussi un #décorbarbeau avec #fleurettesbleues, branchettes rouges, feuilles vertes et branches dorées.
Quelques rares #paysagespolychromes, parfois à dominante jaune.
Mais les décors les plus fréquents sont les #camaïeux #bruns ou #sépia sur fond blanc ou jaune clair, traités en frises ou médaillons, représentant des sujets allégoriques, des paysages, des #scènesdenfants ou #bucoliques avec personnages, ou des #animaux.
MANUFACTURE DE PORCELAINE D ISIGNY 1839 1845
Le fondateur : FREDERIC LANGLOIS
Frédéric Langlois, né en 1802 à Caen, avait travaillé avec son père Joachim dans les manufactures de Valognes, Bayeux et participé à leur prospérité. Suite à un mariage considéré comme une mésalliance par sa famille, il quitte Bayeux en 1838.
En janvier 1839, il crée courageusement une manufacture concurrente à Isigny, à quelques dizaines de kilomètres de celle de sa famille. Sans capitaux, il trouve des commanditaires pour louer un local, l’aménager et acheter du matériel. Il est rejoint par des ouvriers de Bayeux et complète son personnel sur place.
Au début, ses fabrications de luxe inspirées de Bayeux connurent un certain succès. En 1840, l’effectif avait atteint 60 personnes. Infatigable, Frédéric Langlois décorait lui-même certaines pièces. C’était aussi un chercheur qui tenta de lancer de nouveaux produits comme une porcelaine recouverte d’émail brun en 1840 ou des objets en grès cérame en 1841, innovations récompensées dans des expositions.
Mais les ventes ne suivaient pas, causant des problèmes de trésorerie. Une société par actions fut créée en 1843, Frédéric Langlois devenant minoritaire. Malgré de nouveaux succès aux expositions, les difficultés financières réapparurent et les actionnaires décidèrent une liquidation amiable en 1845.
La production ressemblait à celle de Bayeux : articles de laboratoire, de ménage, pièces de luxe comme services de table, vases... On y trouve l’influence style Louis-Philippe. Les décors imitaient souvent ceux de Bayeux avec moins de précision. Des scènes chinoises et bouquets polychromes étaient aussi utilisés. Quelques pièces en biscuit furent réalisées. Outre la porcelaine, on produisit également une porcelaine brune à feu et du grès cérame.
Les décors principaux utilisés par la manufacture de porcelaine d'Isigny
Le plus souvent, on a gardé le fond blanc naturel de la #porcelainedisigny, qui est légèrement plus gris bleuté que celle de #Bayeux. Mais on a aussi fréquemment utilisé des fonds #celadon et, plus rarement, vert foncé.
- #Décorbleugrandfeu, #rougeegyptien et #ormat en #imitation du décor Bayeux veuve Langlois, ce qui s'explique par l'origine d'un certain nombre d'#ouvriers et de #décorateurs venus de cette #manufacture. Cependant, les touches de couleur sont appliquées de façon moins précise, en coups de pinceaux rapides. La part du rouge est aussi beaucoup plus réduite, pouvant même dans certains cas avoir complètement disparu.
- Sujets d'#inspirationorientale avec des #scèneschinoises (pagodes, palmiers). Il est intéressant de comparer le même décor traité par la manufacture de Bayeux et par celle d'Isigny.
- #Décorspolychromes, souvent dans des #médaillons associés à des ors en relief : guirlandes de #fleurs, #bouquets, #oiseauxpolychromes. Pas de paysages ni de personnages.
Conclusion :
Les manufactures de porcelaine de Valognes, Caen et Isigny ont connu des histoires différentes mais ont toutes trois produit des pièces de qualité. La manufacture de Valognes, créée en 1792, a connu des débuts difficiles mais a réussi à se développer sous la direction de Joachim Langlois, qui a introduit des pièces de luxe destinées aux châteaux et à l'exportation. La manufacture de Caen, créée en 1797, a d'abord produit de la faïence avant de se tourner vers la porcelaine. Elle a connu un certain succès mais a dû fermer définitivement en 1814 en raison de problèmes financiers. La manufacture d'Isigny, créée en 1839 par Frédéric Langlois, a produit des pièces inspirées de celles de Bayeux mais a dû fermer en 1845 en raison de difficultés financières.
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Auteur : Claude VILARS expert en Arts
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