C’est à la fin du XVIIIe et au début du XIXe siècle que l’armoire normande prend toute son importance : elle devient tradition populaire, s’enracine profondément dans l’inconscient collectif et, par-dessus tout, le reflet concret d’une position sociale.
L’ armoire est liée directement au mariage et fait partie du rituel entourant la cérémonie.
En plus des objets, effets et ustensiles symbolisant les tâches domestiques incombant désormais à la jeune mariée, l’armoire trône dans « le banneau » tiré par un cheval, bien en évidence, jusqu’au domicile des nouveaux époux, la veille des noces. Coutume qui n’a disparu que voici peu de temps de nos campagnes…
Avant l’arrivée en ce logis, « l’armoire normande » avait déjà un long passé : au minimum l’âge de la jeune mariée. À la naissance d’une fille, en effet, la tradition était de faire couper le chêne nécessaire à la future armoire. Environ dix ans plus tard (période correspondant à la communion) le bois, alors séché, était débité. Puis on attendait l’époque de fiançailles…
Alors, plusieurs solutions se présentaient à la famille : soit le menuisier du village était chargé d’exécuter les différents éléments de l’armoire et les envoyer à décorer chez un sculpteur de la ville la plus proche, soit le meuble était conçu par le menuisier du village et terminé, sur place, par un sculpteur itinérant. Ou bien l’ouvrage était entièrement confié à un menuisier sculpteur itinérant, il s’installait au domicile des parents de la jeune fille pendant toute la durée de son travail.
La valeur de ces travaux était en rapport direct avec la qualité et l’abondance des sculptures qui, aux yeux des voisins, parents, amis et visiteurs allaient symboliser la puissance sociale de la famille. Le prix de l’armoire était fixé, notamment, en fonction du nombre de roses sculptées. Ce nombre allait de un à cinq, non pas sur l’ensemble de l’armoire, bien entendu, mais par « réserve ».
Le caractère itinérant de nombre de ces menuisiers et sculpteurs est à l’origine de nombreuses méprises en ce qui concerne la provenance des meubles qui sont parvenus jusqu’à nous… En effet, il est souvent arrivé que,lors de ses déplacements, l’artisan, tout en respectant l’idée générale de la commande qu’on lui passait, produise un meuble qui subira non seulement l’influence de sa propre personnalité et de ses critères d’esthétiques, mais encore celle de l’adaptation, voire de la réplique, de tel ou tel motif qu’il aura rencontré lors de ses pérégrinations. Aussi, toute classification doit être formulée avec beaucoup de prudence !
De nombreux amateurs pensent pouvoir justifier leurs certitudes sur l’examen des ferrures et entrées de serrures des armoires mais contrairement aux idées reçues, le fait qu’une armoire ait des peintures et entrées en fer ou en laiton est sans rapport avec son ancienneté. Cependant, ce détail permet de déterminer l’origine de la fabrication. Ainsi, on admet en principe que dans la Manche, la région de Vire et la Haute-Normandie, elles sont en laiton, alors qu’elles sont en fer pour le reste des autres « Pays » normands. Bien sûr cela ne détermine pas la valeur d’une armoire normande.
Pour les amoureux de notre patrimoine je ne peux que vous conseiller une visite au château de Martainville :
Tres belle collection dans un cadre magnifique.
Enfin, les armoires normandes sont des meubles emblématiques réalisés en bois de chêne massif sculpté. Leur esthétique épurée et leurs motifs végétaux typiques en font des œuvres très prisées. De nombreux menuisiers normands fabriquent toujours ces meubles traditionnels aux lignes intemporelles.
Enfin, Vire est le berceau des célèbres armoires normandes que l'on retrouve dans de nombreuses demeures régionales. Fabriquées en chêne massif et ornées de sculptures d'inspiration végétale, ces meubles traditionnels perpétuent un savoir-faire unique. De talentueux menuisiers et sculpteurs sur bois y sont installés.
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Une suite est donnée à cet article : Les armoires viroises
Auteur : Claude VILARS expert en Arts
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